Je
ne sais pas pourquoi, j’étais convaincue que Le Renard et la Couronne de Yann Fastier était un roman fantasy.
Enfin si, je sais pourquoi : vous avez vu la couverture ? J’ai
commencé à le lire sur ma liseuse, et le début ne m’a pas détrompée : dans
un village au nom aux consonances fantastiques, la petite Ana perd sa
grand-mère et, orpheline, doit survivre dans la rue. Sur son lit de mort, la
vieille femme avait murmuré une phrase étrange impliquant un renard et une
couronne… Ça fait fantasy, non ?
Du
coup, quand j’ai voulu acheter la version papier – le début m’avait suffi pour
savoir que j’adorerais – j’ai eu beau le chercher dans le rayon fantasy, je ne
l’ai pas trouvé. Une vendeuse m’a aidée, je suis repartie avec Le Renard et la Couronne sans me
douter de quoi que ce soit.
L’histoire
est variée : Ana lutte pour survivre aux côtés d’un
gang de voleurses, puis, alors que sa vie se stabilise, elle est poursuivie par
un assassin… Et moi, j’ai donc attendu jusqu’à la fin l’apparition de la magie.
Mais c’est la première guerre mondiale qui a pointé son nez – ou plutôt ses
prémices.
Malgré
cette légère déception, qui, soyons honnête, est de ma responsabilité – et
beaucoup liée à ma nullité en géographie, ma mère a tout de suite identifié
l’endroit où ça se passait – j’ai adoré ce roman. La romance entre la princesse
et la voleuse, quoi qu’amusante, ne m’a pas emportée, mais l’intrigue est riche
en rebondissements – il y a trois parties, et le scénario de chacune est on ne
peut plus différent. Et surtout, il y a beaucoup de clichés retournés contre
eux-mêmes. J’adore ça !
Surtout
le dernier, que je vais développer au cas où certain·es roulent des yeux en
reconnaissant l’éternel cliché de la princesse disparue. Il y a, en effet, une
princesse disparue – étrange d’ailleurs que les monarques soient si souvent
idéalisés en littérature jeunesse, alors qu’on prône la démocratie… peut-être
parce qu’on aime mettre en valeur le pouvoir détenu par une personne
unique ? Je m’égare.
Généralement,
une fille qui découvre qu’elle est la princesse disparue commence par refuser
le pouvoir, affirmer que ça ne l’intéresse pas. Puis elle change d’avis et la
morale de l’histoire c’est « les meilleur·es monarques sont celleux qui ne
veulent pas du pouvoir ». Eh bien ici ce n’est pas exactement ça la
conclusion… En soi, ça n’aurait pas dû être révolutionnaire, mais c’était la
première fois que je lisais un tel scénario.
(TW)
Il y a un viol, mais il n’est pas graphique, et c’est un type de viol
souvent minimisé ou romancé – viol conjugal, par une personne dont la
narratrice est amoureuse – alors qu’ici il est dénoncé comme étant un viol.
J’ai trouvé le traitement réussi, quoique peu approfondi.
En
particulier dans la relation entre Ana et son amoureuse. J’ai trouvé la « réalisation » d’Ana un peu étrange, en mode « oh mais je suis
amoureuse d’elle et soudain je ne peux plus me contrôler » et ça m’a
dérangée qu’elle embrasse l’autre alors qu’elle la croit inconsciente. Le fait
que son amoureuse lui donne des surnoms affectueux infantilisants ne m’a pas
aidée à apprécier le couple. Pourtant, j’aime les deux personnages, j’aime
leurs interactions ! Elles sont fortes, elles sont cool, et elles ne sont
pas seules au monde. Elles ont des ami·es, et… à la fin, une scène en
particulier m’a fait monter les larmes aux yeux. Je ne pleure quasiment jamais
en lisant, et jamais pour des évènements que d’autres trouvent tristes.
Quelqu’un meurt ? Rien à faire. La grand-mère de la narratrice lui écrit
une lettre pour lui dire qu’elle l’aime ? Me voilà en larmes…
Et
voici le paragraphe déclencheur, alors qu’un des adversaires d’Ana rentre chez
lui :
« Il me désigna un bel
officier d’une trentaine d’années.
— Et puis,
vous savez, je crois que nous avons plus en commun que vous le pensez…
Je levai les
sourcils, interrogative.
— Je
souhaite que vous n’enduriez jamais ce que j’endure, souffla-t-il. Je souhaite
que vous soyez heureuse avec votre amie. Et pour ce que j’ai pu savoir de cette
étonnante jeune personne, je crois que vous le serez.
Rien qu’en rédigeant cet article, je suis de nouveau en train de larmoyer. J’aime quand les personnages LGBTQI+ ne sont pas isolés…
Le Renard et la Couronne nous embarque dans une aventure passionnante, variée et qui tord le cou aux clichés pour aborder des thèmes importants. Sur ce, j’arrête d’écrire, j’ai besoin d’un mouchoir…
Avertissements : viol